Edouard Taufenbach

Bastien Pourtout

À propos

Bastien Pourtout, né en 1982, est diplômé d’un Master en Histoire économique et sociale à Paris X (2012) et d’un Master en Photographie et Art contemporain à Paris VIII (2019). Edouard Taufenbach, né en 1988 est diplômé d’un Master en Arts et Médias numériques à Paris I (2014).

Ils travaillent ensemble depuis Spéculaire (2018-2019) autour de la collection de photographies vernaculaires de Sébastien Lifshitz. Les collages réalisés sont présentés à la galerie Binôme, à Paris Photo la même année, et l’année suivante à Rome, à Londres, à Mexico et à New York, au festival de Photographie d'Athènes, ainsi qu'à la Villa Noailles. Ils publient une monographie sur ce projet avec les Éditions l’Artière. Puis ils présentent La méthode (2020) autour des structures des Hommages au carré de Josef Albers.

En 2020 Ils sont lauréats du Prix Swiss Life à 4 mains pour le projet Le bleu du ciel, sur le vol de l’hirondelle. Ils partent en résidence à la villa Médicis pour réaliser ce travail et décident à leur retour de devenir un duo artistique. Ce projet est exposé au Musée de la piscine à Roubaix, au salon photographique Approche, dans divers galeries et à Arles pour Les rencontres de la photographie. Ils réalisent une seconde publication avec les éditions Filigranes.

En 2022 ils ont organisé une exposition avec le galeriste/collectionneur Pierre Passebon autour de sa collection de Photographie de Marlène Dietrich ; dont deux œuvres ont été présentées à la cinémathèque sous la curation de Matthieu Orléan pour l’exposition Cinemode par Jean-Paul Gaultier.

Cette année pour entamer leur collaboration avec la Galerie C, ils présentent l'exposition Le jardin qui bascule dans l'espace parisien. Ce projet se poursuivra cet automne à Paris Photo.

Leur pratique en duo se définit comme une méthode faite de protocoles et de jeux. Par différents appareils de prise de vue (réflex numérique, téléphone portable ou Rolleiflex), ils produisent des photographies à agencer, à associer, à faire circuler comme des messages de l’un pour l’autre — tout un langage visuel. Toujours en train de se faire, les images ne sont pas conçues à priori, elles s’inventent et se construisent dans l’échange.

Ils travaillent avec la Galerie C à Paris et à Neuchâtel et avec la galerie Almanque fotográfica à Mexico. Leurs travaux ont fait l’objet de nombreuses parutions dans la presses tel que Le Monde (9 juillet 2021), Libération (7 mai 2021), Télérama (6 février 2021) ou The New York Times (9 novembre 2018).

Projets

LE JARDIN QUI BASCULE // 2023

IMANÉO — MC TUNIS // 2022

OBSESSION DIETRICH // 2022

LE BLEU DU CIEL // 2020

LA MÉTHODE // 2020

SPÉCULAIRE // 2018

En 2018, Edouard Taufenbach poursuit ses expérimentations plastiques d'après photographie vernaculaire - depuis les séries CINEMA : histoires domestiques (2016-17) et Hommage2 (2015) — Spéculaire puise ses matériaux dans la collection de photographies anonymes du réalisateur Sebastien Lifshitz.

La sélection d’images retient l'épanouissement des corps nus ou à demi, en vacances au bord de l’eau ou sur les terrains de sport, dans l'intimité de la chambre et du jardin. L'hédonisme est de mise, et c'est dans cette liberté des courbes, des lignes et des motifs, qu'Edouard Taufenbach construit une autre dimension spatiale et séquentielle pour ces photographies anciennes.

Agencement méticuleux de dizaines de fragments noirs et blancs, minces lames brillantes de papier photo, les collages jouent de la déformation et de la démultiplication des points de vue, créant des effets stéréoscopiques. Dans cette approche jubilatoire d'appropriation et de transformation des images planes et passéistes, Edouard Taufenbach partage sa fascination pour l’image amateur, vécue comme support de projections et de désirs.

Sans doute est-il possible d’écrire une histoire paradoxale de la photographie qui réunirait toutes les tentatives pour sortir de l’image plate et fixe qui, depuis ses origines, semble la qualifier. Elle puiserait autant dans les pratiques populaires que dans les usages scientifiques et artistiques du médium. Les principaux jalons en seraient la photographie stéréoscopique qui, dès le milieu du 19e siècle, gràce à deux vues légérement décalées, entend donner l’illusion du relief, la chronophotographie qui, vers 1880 et l’arrivée de l’instantané, permet de décomposer le mouvement ou, encore, d’abord chez les amateurs puis les artistes, le photocollage et sa capacité à multiplier les points de vue et brouiller la perspective, comme, dans les années 1980, les joiners d’inspiration cubiste de David Hockney. Que ce soit dans l’espace ou le temps, parfois les deux à la fois, ces recherches ont pour finalité d’animer l’image. Spéculaire d’Edouard Taufenbach reprend à son compte ce triple héritage auquel l’artiste ajoute un intérêt, actualisé par les jeunes générations en quête de décloisonnement, pour l’objet photographique.

Pour cette série, Edouard Taufenbach n’a pas travaillé, comme à son habitude, avec des photographies qu’il aurait dénichées, mais à partir de la collection d’images anonymes que le réalisateur Sébastien Lifshitz réunit depuis plusieurs décennies. Sans doute était-ce pour lui la certitude de trouver des corpus cohérents et des clichés plus forts et plus rares que le tout venant de la photographie vernaculaire qu’il s’appropriait jusqu’alors. Même s’ils sont importants, comme en ont témoigné l’exposition et le livre Mauvais genre, cette collection ne se réduit pas aux thèmes de l’homosexualité et du travestissement. Guidé par Sébastien Lifshitz, Edouard Taufenbach y a, plus largement, puisé des photographies célébrant la liberté des corps, une liberté qui s’épanouit dans l’intimité mais aussi au contact de la nature, tout particuliérement, au bord de l’eau.

Ces images du loisir, du plaisir et du désir, Edouard Taufenbach les démultiplie, les fragmente, en réagence manuellement les parties, parfois à des échelles différentes, dans une composition issue d’une règle de nature mathématique. Cette dernière est propre à chacune des images originelles qui, d’une certaine manière, l’imposent. Elle pointe, souligne et amplifie un aspect formel ou narratif. Ici, les courbures d’un corps. Là, un geste. Elle permet aussi, tout au contraire, de réinterpréter complétement l’image, d’en inventer une nouvelle. Qui soupçonnerait que ce bouquet de silhouettes féminines dont le dynamisme est renforcé par son format vertical provient d’une image horizontale figurant une farandole, somme toute assez sage, de baigneuses ? Dans tous les cas, Edouard Taufenbach a œuvré avec une jubilation non dissimulé qui décide aussi de certains titres : Hommage à Pierre M., pour l’artiste érotomane, travesti et fétichiste Pierre Molinier, ou Hippolyte B. Junior, pour Hippolyte Bayard, l’un des inventeurs de la photographie qui, faute de reconnaissance, s’est mis en scène en noyé.

Dans Spéculaire, conséquence de la fragmentation et de la répétition, l’action figée par l’instantané semble devoir se dérouler dans le temps bien au-delà du cliché et, gràce aux changements d’échelle, le regard semble pouvoir pénétrer la profondeur de l’image. Ces effets sont renforcés par les découpes – presque des facettes – du papier dont la brillance évoque le verre et ses reflets, quand l’artiste ne produit pas de véritables volumes, en pliant l’image ou en la plaçant sous des prismes, qui imposent au regard de se déplacer. Mais Edouard Taufenbach ne se contente pas d’animer des images plates et fixes. Il parvient à insuffler la vie à ces photographies anonymes du passé où l’on ne peut s’empêcher, d’habitude, de guetter la mort à l’œuvre.

Étienne Hatt, 2018

CINEMA : histoires domestiques // 2016

These collages are made from painted photographic reprints. They are inspired by practices of film reappropriation seen in “found footage.” As the name suggests, found footages from ordinary films are reused as a medium, being painted, scratched, and discolored. For this research, I use anonymous vernacular family photographs which I multiply, varying the framing each time. The collage technique allows me to create an object, a form that is both united and fragmented; an organic construction where each image is interesting for itself as much as for the whole to which it contributes.

Between the images, the film


Regarding the work of Edouard Taufenbach: CINEMA : histoires domestiques

« The album of family photographs is a real book, whose pages of images, even scattered, may be skimmed through like a novel. »
Anne-Marie Garat1

The series of collages presented by Edouard Taufenbach under the title Cinema: Home Stories is part of a double belonging: the narrative of the cinema on the one hand and the family novel on the other. Still from a collection of old private photographic prints2 used as triggers for fiction, collages of varying dimensions explore the abilities of a simple domestic photography to generate a narrative, to produce cinema.

Long before its invention in its modern form, cinema (the moving image) had sought its potential places of appearance in optical devices bringing together the magic of illusion and technical pragmatism (from magic lanterns to optical toys). Cinema broadcasts films in a form commonly used throughout the 20th century, the cinematographic show. Its stage is a theatre (the cinema theatre), where viewers come together, always more or less fascinated by the projection device and the shadows that it generates. Edouard Taufenbach's recent work explores the side of the moving image as reel, the film in its materiality: the photographic support, the transparency of the reel, the colour pigments that permeate the surfaces. For each of his projects, from a single photograph, either found, collected or extracted from family archives, he builds a film that is not projected but exhibited, taken apart into geometrically articulated sequences on white panels. Borrowing from iterative music as much as from the structural cinema of Peter Kubelka or Paul Sharits3, from the flicker films as well as the micro rhythms of urban music, Edouard Taufenbach's video and photographic works proceed from the same sequencing gesture which produces a continuous yet composite space-time in which the discrete cuts are smoothed by repetition and loop effects.

Like the sharp tip of a scrutinizing gaze, the oblique lines which organize the surfaces form a rhythmic network (a partition?) which, combined with the repeated original photography, itself reiterated with thin variations, produce a cinematic effect. This effect is hard to name and describe, although it is highly perceptible. The two components of the cinema, the photogram and the unreeling, appear only partially in these "fixed" collages in front of which the viewer is invited unreel by hand a celluloid film tape. From one image to another, the gaze skims through the geometric strips searching for the modifications, the differences, the displacements and the deframings which will lead the photographic fixity to wobble, and draw it towards an optical movement, at the foundation of the cinematographic device. As in cinema, a certain duration is necessary to watch these images to which the careful organisation adds a precious character. Seen from afar, the collages evoke film strips and display the principle of cinema, its mechanics. Seen from up close, they highlight the images and their referent: people, atmospheres, relationships, possible stories, potential life stories. The memorial traces captured in the photographic process are combined with the cinematographic mechanics. The latters are treated pictorially through very precise plays of cuts and montage on the canvas, place of transformations. Here, fiction has found a possibility to build up and the viewer-reader can project his own stories and let real or imagined memories surface into the present. He can thus "se faire des films” as Edouard Taufenbach says, and elaborate freely his own representations. Working on Art.

Françoise Parfait


1 Anne-Marie Garat, Photos de famille, Actes Sud, 2011.
2 Voir la série précédente Hommage2 présentée en 2015 construite à partir d'un album entier de photographies de famille.
3 Qui « exposent » la pellicule sous la forme de Frozen Film Frames sous plexiglas.

HOMMAGE2 // 2015

HOMMAGE2 est un double hommage : à une famille anonyme et au travail d'expérimentation géométrique et chromatique de Josef Albers.

Cette série est composée de 26 collages réalisés à partir d'un seul et unique album de 26 photographies de famille anonyme datant du début du XXeme siècle et acheté aux puces. Chacun des collages – réalisé comme un portrait – est construit par la reproduction et la démultiplication des clichés contenus dans l'album.

Je construits par cette démultiplication une forme précise dérivée de la forme toujours identique des Hommages to the Square et j'applique en peinture vitrail les couleurs de Josef Albers sur les visages anonymes. Une interprétation possible des Hommages to the square de Josef Albers est proposée à travers la forme unique de chaque collage. A l'exception des couples présents dans l'album pour lesquels j'ai alors choisi des Hommage to the square conçue en paire, liant ainsi les personnages de cet album par une forme jumelle. Le déploiement dans une géométrie d'un même portrait démultiplié, coloré, crée une énergie empathique nouvelle et appelle à la mémoire du regardant. Il transpose le portrait singulier originel en une mémoire plus collective.

SFUMATO // 2015

SFUMATO est une installation in situ, immersive. Elle a été présentée dans le cardre du off de la NUIT BLANCHE en 2015, puis en 2016 à l’église Saint-Merry.

Elle se compose de huit vidéos réalisées à partir de captation de différents ciels ; disposées en hémicycle, elles sont déployées comme les panneaux d’un polyptyque. Au commencement de SFUMATO, apparait huit images de ciel, nettes, verticales et de forme cintré — lentement des nuages s’y déplacent. Lentement aussi et à des rythmes différents, les images de chaque vidéo semblent se brouiller ; leurs contours deviennent incertains, leurs sujets disparaissent, comme si une force de gravité les faisait s’effondrer.

Au terme des vidéos — pour chacune singulier — l’image semble être aspirée vers le centre et disparait. Puis la boucle boucle, et de nouveau apparait un ciel net, réel. S’organise ainsi des cycles, où les vidéos (selon leurs durées) se terminent ou recommencent en même temps ; créant un panorama, composé, où huit métamorphoses de ciels en cieux s’ouvrent et se fanent — achroniques.

Ce dispositif visuel est accompagné d’une création sonore réalisée par Paul Braillard. Méditatives, minimales, les sonorités composées se joignent aux images pour immerger le spectateur. La présentation du présent devient représentation. L’image devient impression, sensation. Des ciels du début adviennent: traces, formes et abstractions, champs laissés libres à l’imaginaire. Dans la contemplation du Ciel, l’homme projette ses rêves, aspirations et angoisses, — paradis et apocalypse — conjointement unis dans le tournoiment des volutes qui nous surplombent.

Le travail vidéo réalisé pour SFUMATO, à l’instar du sfumato en peinture, se fait par l’accumulation de plusieurs couches. Il est obtenu par la superposition de chaque vidéo à elle-même un grand nombre de fois, à une échelle de plus en plus petite et avec un très léger décalage temporel d’une couche à l’autre. Cette construction progressivement stratifié de l’image — les couches apparaissent au fur et à mesure — transforme les ciels originelles en halos lumineux. L’empilement progressif de strates pour chaque vidéo dessine en leur sein des cônes — comme ceux des projections mais en sens inversé. Les cadres cintrés des vidéos deviennent alors des perspectives — les plans de projection deviennent des volumes, des ailleurs : univers arrière des images, foisonnant et sensible, où celles-ci disparaissent.

La durée des huit vidéos de SFUMATO est fondée sur le rapport de proportion 3/2 ; chaque vidéo mesure moitié plus que la précédente. Ce choix crée dans l’installation un dialogue entre les vidéos, un jeu d’alignement, de cycle, et d’éclipse. Ainsi lorsqu’une vidéo se répète trois fois elle se réaligne avec la vidéo suivante qui elle s’est répétée deux fois. La durée des vidéos est de 2’50 pour la Ière (la plus courte) à 48’24 pour la VIIIème (la plus longue), et la durée de la boucle totale — où toutes les vidéos se réalignent — est elle supérieure à quatre jours.

La composition sonore de Paul braillard est réalisée elle aussi par des processus de superposition, elle dure le temps 1% de la boucle total : 62 minutes.

Collab'

Edouard Taufenbach et Bastien Pourtout sont représentés par l'agence créative Ôpos pour des projets de collaboration dans l'univers de la mode et du design.

HERMES // 2022

CHANEL // 2019

CACTUS X TER ET BANTINE // 2018

#TFWGucci // 2017

I'M A CLICHÉ - GONG 3000 - JONATHAN KUSUMA // 2014

Livres

OBSESSION DIETRICH // 2022

LE BLEU DU CIEL // 2020

L'IMAGE DANS LE MIROIR // 2020

NFT

SWINGING GARDENS // 2023

OBSESSION DIETRICH — un travaille autour de la collection de Pierre Passebon.

  • SWINGUING GARDENS est une collection d'NFT, extension numérique de l'exposition LE JARDIN QUI BASCULE, présentée à la Galerie C à Paris, du 18 avril au 3 juin 2023. 18 avril au 3 juin 2023.
  • COLOURS IN MOTION // 2022

    Presse